New York – Les marchés américains ont été pris vendredi d’un brusque accès d’angoisse après la réouverture de l’enquête sur les emails d’Hillary Clinton, de loin leur candidate favorite face à l’imprévisible Donald Trump.
En hausse pendant la majeure partie de la séance, Wall Street est tombée dans le rouge après l’annonce de la réouverture par le FBI d’une enquête sur l’utilisation d’emails privés par Mme Clinton lors de son passage au secrétariat d’Etat, au cours de la première présidence de Barack Obama entre 2009 et 2013.
« C’est un choc« , a reconnu Chris Low, analyste chez FTN Financial.
Même si la Bourse a finalement limité les dégâts, le Dow Jones ayant perdu 0,05% et le S&P 500 0,31%, l’indice Vix qui mesure la volatilité, a quant à lui accéléré jusqu’à près de 17,50 points, contre moins de 15 juste avant.
S’il devait encore bondir avant l’élection du 8 novembre, cela montrerait que « le marché trouve que quelque chose cloche« , selon les termes de J.J. Kinahan, chef de la stratégie de marché à TD Ameritrade, la barre des 20 points signalant dans beaucoup d’esprits une fébrilité importante.
A en croire la majorité des analystes, une victoire de Mme Clinton est perçue comme plus favorable aux marchés, car gage de continuité. La candidate démocrate est une femme politique aux positions bien connues et les investisseurs s’attendent à ce qu’elle poursuive les politiques de M. Obama.
A l’inverse, une potentielle présidence Trump est génératrice d’incertitudes, à la fois à cause du penchant du républicain pour la controverse mais aussi de son manque d’expérience politique.
Donald Trump a par exemple accusé la présidente de la Réserve fédérale américaine (Fed), Janet Yellen, d’être un instrument politique au service du parti démocrate et a attaqué des partenaires commerciaux importants, la Chine et le Mexique.
Considéré par certains comme un baromètre des chances de Donald Trump, le peso mexicain a d’ailleurs nettement reculé face au dollar au moment de l’annonce sur les emails d’Hillary Clinton.
– Autres incertitudes –
L’affolement des marchés vendredi n’a fait qu’accentuer la méfiance de certains analystes face aux sondages très favorables à Mme Clinton, d’autant que les esprits restent marqués par le souvenir cuisant de la victoire inattendue des partisans britanniques du « Brexit » lors du référendum de la fin juin.
Spécialiste des changes, Kathy Lien de BK Management, estime que les sondages ont endormi les marchés, leur donnant un sentiment de sécurité.
« Le marché sous-estime la possibilité que les choses tournent mal en cas d’une victoire de M. Trump ou d’un potentielle division du pays causée par une victoire de Mme Clinton« , prévenait-elle avant même l’annonce de la réouverture de l’enquête sur les emails.
Pour autant, les analystes ne sont pas tous d’accord sur cette supposée confiance des investisseurs, certains faisant remarquer que la prudence semble déjà régner depuis plusieurs séances, vu le faible volume d’échanges ainsi que la stagnation de l’indice élargi S&P 500.
Reste que la période n’est de toute façon guère propice à la prise de risque dans la perspective, jugée de plus en plus probable, d’un relèvement des taux d’intérêt par la Réserve fédérale (Fed) en décembre et face à des résultats d’entreprises mitigés.
« Je ne pense pas qu’une victoire de (Hillary) Clinton soit acquise à 100%« , estime J.J. Kinahan.
« C’est ce que (les marchés) veulent« , a pour sa part estimé Nathan Thooft, chez Manuflife Asset Management. « Si cela n’arrive pas, je pense qu’il y aura beaucoup d’incertitudes et une possible orientation à la baisse des marchés« , prédit l’expert.