Le suspect-clé Mohamed Abrini a expliqué être l’homme au chapeau qui accompagnait les deux kamikaze de l’aéroport, son complice du métro a été identifié et les enquêteurs ont appris que les terroristes voulaient initialement frapper Paris plutôt que Bruxelles. Le point sur l’enquête.
Depuis l’arrestation de Mohamed Abrini, vendredi 8 avril dans la commune bruxelloise d’Anderlecht, l’enquête progresse à grand pas. Trois autres personnes ont depuis été inculpées et les informations dévoilées au compte-goutte par les enquêteurs laissent entrevoir plus clairement les projets et le mode opératoire des terroristes responsables des attentats de Bruxelles -32 morts- et de Paris -130 morts. L’Express fait le point.
Abrini affirme être « l’homme au chapeau » de Bruxelles
Lors de ses auditions, le Belgo-Marocain de 31 ans et ami d’enfance de Salah Abdeslam, a reconnu être le troisième homme qui accompagnait les deux kamikazes de l’aérogare de Bruxelles, le 22 mars dernier. Soit le fameux « homme au chapeau » que les enquêteurs cherchaient à identifier à l’aide d’images de vidéosurveillance. Selon une source proche de l’enquête, l’analyse de ces images a contribué à le confondre.
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En conséquence, Abrini, déjà inculpé dans le volet français, l’est désormais aussi pour « assassinats terroristes et tentatives d’assassinats terroristes » dans l’enquête sur les attentats de Bruxelles. Délinquant multirécidiviste connu des policiers, il est considéré comme étant le onzième homme des attentats de Paris et Saint-Denis. A-t-il pour autant dit la vérité aux enquêteurs?
« Cela ne correspond pas au mode opératoire de l’EI », le groupe Etat islamique, qui a revendiqué les attentats, a déclaré un spécialiste belge de l’islamisme radical, Peter Van Ostaeyen, estimant qu’il a pu mentir pour protéger le reste du réseau.
L’étonnant profil du 2e terroriste du métro bruxellois
Le deuxième homme du métro bruxellois, arrêté le même jour que Mohamed Abrini, a été identifié. Il s’agit d’Osama Krayem, un Suédois de 23 ans qui avait utilisé le nom de Naïm Al Hayed lors de son enregistrement sur l’île grecque de Leros.
Selon la RTBF, il serait, comme Abrini, passé aux aveux. Osama K. a indiqué être parti le 22 mars d’un appartement d’Etterbeek, à Bruxelles, avec Khalid El Bakraoui, selon la chaîne publique. Les deux hommes ont été filmés ensemble quelques minutes avant que ce dernier ne se fasse exploser à la station de métro Maelbeek.
Les enquêteurs seraient à la recherche du sac à dos d’Osama Krayem, visible sur les images de vidéosurveillance. Une perquisition menée samedi à Etterbeek n’a rien donné. Les enquêteurs soupçonnent Salah Abdeslam d’être allé chercher Krayem, ainsi que le dénommé Amine Choukri, à Ulm en Allemagne, le 3 octobre quand ils sont, très probablement, rentrés de Syrie.
Bruxelles, simple plan B, Paris dans la ligne de mire
Selon « plusieurs éléments de l’enquête » dévoilés ce dimanche, les attentats de Bruxelles étaient en fait le « plan B » des terroristes. La cellule djihadiste voulait en premier lieu viser Paris mais, traqués, ils se seraient précipitamment décidés à viser la capitale Belge, selon le parquet fédéral belge.
Le consultant d’iTELE Claude Moniquet, citant des sources proches de l’enquête, a expliqué qu’un ordinateur a été retrouvé. Selon lui, il contenait notamment un fichier listant des cibles françaises, à savoir le centre commercial « Les 4 Temps » à La Défense, ainsi « qu’une association catholique conservatrice » dont il n’a pas précisé le nom. Le quartier de La Défense était déjà visé par Abdelhamid Abaaoud, l’instigateur présumé des attentats du 13 novembre, qui prévoyait de s’y faire exploser.
Selon des médias belges dont L’Echo et la RTBF, les aveux faits par Mohamed Abrini aux enquêteurs corroboreraient cette information. Le plan était de frapper à nouveau la France, mais l’arrestation de Salah Abdeslam -et de trois autres personnes-, cinq jours avant les attentats, a précipité les choses et poussé les terroristes à frapper la Belgique, aurait-il admis.
Selon le Premier ministre français Manuel Valls, ces informations sont la « preuve des menaces très élevées qui pèsent sur la France ».
Argenteuil, Bruxelles, Paris: une seule cellule?
La composition de l’équipe qui devait frapper la capitale française n’a pas été clairement définie par les enquêteurs, mais il est possible que Reda Kriket, le français de 34 ans arrêté fin mars, y figurait. Il était soupçonné d’être lié à un projet d’attentat « imminent » déjoué en France.
Preuve des liens qui unissent les différents protagonistes au sein d’une même cellule djihadiste, la justice belge a inculpé deux hommes pour « complicité d’assassinats terroristes », soupçonnés « d’avoir aidé Mohamed Abrini et Osama Krayem ».
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Hervé B. M., un Rwandais de 25 ans, a été arrêté en même temps qu’Osama K., et Bilal E. M., 27 ans, a été interpellé dans la commune de Laeken vendredi soir. Selon une source proche du dossier, ce dernier s’appelle Bilal El Makhoukhi, condamné en 2014 à cinq ans de prison lors du procès du groupuscule islamiste Sharia4Belgium à Anvers (nord). Ce Bruxellois a combattu en Syrie où il a été blessé à la jambe, selon la presse locale. Mais son rôle présumé dans les attentats n’est pas (encore) défini.
Les arrestations ont été suivies de plusieurs opérations de police: à Anderlecht, au lieu de résidence possible de Mohamed Abrini, et dans les logements de Bilal El Makhoukhi et Hervé B. M. Ni arme ni explosif n’ont toutefois été découverts.