Notre réponse pour le climat

Cette histoire fait partie de Covering Climate Now, une collaboration mondiale de plus de 250 médias pour renforcer la couverture de l’histoire du climat.
Alors qu’un nouveau sentiment d’urgence d’agir face au changement climatique augmente – par le biais d’appels aux urgences climatiques et de nouveaux accords verts – il est essentiel de limiter les retours en arrière tout en encourageant l’action.
Pire encore, nous ne pourrions rien faire face à l’augmentation de nos émissions mondiales. Mais la pire des choses est de provoquer une résistance populaire à l’action climatique. Si une grande partie de la population se révolte contre les efforts visant à atténuer les émissions, nous ne sommes guère mieux lotis que de n’avoir pas agi du tout. Les avancées doivent dépasser les revers.
La question de savoir s’il faut faire face au changement climatique est, heureusement, largement gagnée La question technique de la façon d’atténuer les émissions est florissante Mais nous devons également aborder la question politique de savoir comment amener les gens à la transition à faibles émissions.
Une révolution minutieuse
Pour maintenir le soutien du public au fil des années et des décennies, les soins sont essentiels. Bien sûr, la crise climatique est elle-même un effroyable manquement au devoir de vigilance de la part des décideurs, et nous en sommes tous de plus en plus exposés aux risques.
Néanmoins, nous ne devons pas négliger ce devoir dans notre réponse. Les décideurs ne peuvent pas se permettre de ne pas se soucier des conséquences de l’action climatique, ni de se soucier des gens qu’elle affecte. Cela devrait être une révolution prudente, qui est urgente sans être téméraire, audacieuse sans être cruelle.
Le politologue américain Joan Tronto et la militante des droits civiques Berenice Fisher ont défini le soin comme tout ce que nous faisons pour entretenir, continuer et réparer notre monde afin que nous puissions y vivre le mieux possible ». Ils proposent plusieurs étapes.
Le premier est de prendre soin d’un problème. Deuxièmement, prendre soin en assumant la responsabilité d’agir. Troisièmement, il faut donner des soins là où l’intention devient action. Et quatrièmement, le fait de recevoir des soins où le soignant s’assure que les besoins de l’autre sont réellement satisfaits. Sinon, le cycle de soins recommence, en reconnaissant que le problème d’origine n’est pas résolu de façon adéquate ou que de nouveaux problèmes sont apparus.
Cette dernière étape est particulièrement critique pour la légitimité et la longévité des transitions à faibles émissions. En tant que problème public, le changement climatique est connu pour sa complexité – un problème extrêmement grave – qui traverse plusieurs systèmes et échelles de temps. Une élaboration prudente des politiques est nécessaire car des conséquences imprévues sont inévitables.
Mais les conséquences escomptées produisent également des reculs. Les manifestations des gilets jaunes en France en sont un exemple spectaculaire, où la hausse de la taxe carbone a été le catalyseur d’une grave crise politique.
Ce n’était pas une question de négligence. Au contraire, la taxe sur le carbone a fonctionné exactement comme il était censé le faire, rendant le carburant plus onéreux à payer. La véritable erreur de jugement était l’insouciance du gouvernement français quant à la façon dont la hausse des prix serait reçue, en particulier parallèlement aux réformes de l’impôt sur la fortune qui renforçaient les inégalités économiques.
Bref, il ne suffit pas de se soucier du changement climatique. Prendre trop soin des fins de la politique – ce que l’urgence tend à encourager – peut conduire à une négligence des moyens.
Les soins doivent plutôt être bien équilibrés. Elle doit responsabiliser les bons acteurs pour les bonnes raisons et avec les bonnes attentes. Elle doit agir avec compétence pour produire les résultats qu’elle promet. Et il doit répondre aux besoins humains, non seulement à l’avenir, mais à ceux des personnes qui vivent aujourd’hui.
Une manière plus prudente
Les transitions justes sont l’exemple le plus connu de l’élaboration prudente de politiques climatiques.
Cette approche reconnaît que des perturbations majeures sont parfois nécessaires, en particulier dans les secteurs à haute teneur en carbone comme l’industrie des combustibles fossiles. Des emplois de longue date seront perdus ou radicalement transformés. Les investissements à long terme seront perdus et les infrastructures déclassées Là où la réalité scientifique ne peut pas bouger, les plans humains doivent plutôt céder.
Pourtant, aussi inévitable que soit cette perturbation, la manière dont elle est déployée ne l’est pas. Une transition peut se faire sans pitié, avec seulement un souci de réduction des émissions. Ou il peut mettre la justice, l’équité et l’inclusivité au cœur, à la fois pour les fins et les moyens.
Les transitions justes impliquent des stratégies industrielles telles que la reconversion, la transition des retraites, l’aide à la réinstallation et d’autres formes de soutien social, ainsi que des stratégies d’investissement qui créent des voies viables vers une économie à faibles émissions.
Mais cela n’est pas seulement nécessaire pour les travailleurs industriels. Il s’adresse aux citadins qui doivent vivre la restructuration des systèmes de transport et d’énergie et la rénovation des environnements bâtis. Il s’adresse aux populations des paysages ruraux qui doivent s’adapter à l’évolution des systèmes alimentaires et aux attentes croissantes de restauration des écosystèmes. C’est pour tous ceux qui dépendent du statu quo à émissions élevées mais qui n’ont pas les moyens de passer de cette économie à la suivante, qui risquent de se faire piquer sans être poussés par les taxes et réglementations carbone.
Une question de jugement
Les soins ne sont pas tout ce dont nous avons besoin. Il peut basculer dans la timidité, prêcher avec prudence et retarder lorsque la hâte est réellement requise. Après tout, si la protection des personnes contre les perturbations devient la condition préalable au changement, alors le changement peut ne pas se produire du tout. Les soins sont une facette du bon jugement politique, mais pas la seule.
Pourtant, si la transition est précipitée ou négligente, si elle privilégie l’ambition à la solidarité, si elle considère la construction de relations comme un obstacle au progrès, si elle se soucie trop des fins de la politique et pas assez des moyens, alors cela créera des la résistance.
Du point de vue du système climatique, cela aussi est un échec. Ce sont les réductions d’émissions, et pas seulement les bonnes intentions, qui comptent.